La verticalité du Nu selon l’artiste peintre Maud Deschamps
Pour terminer un mois de mars que le blog a consacré aux femmes, je reviens sur l’exposition de Maud Descamps intitulée Piliers sacrés qui a eu lieu en janvier 2017 au Centre d’Art de la Chapelle de Boondael, à Bruxelles.
Depuis lors, cette vision du nu, un genre artistique d’autant plus difficile qu’ancien, n’a cessé de m’habiter.
Pourquoi ? Parce que la représentation singulière des corps de Maud Deschamps propose une redécouverte du ou, plutôt, des sujets dont la verticalité s’impose dans une évidence à la fois saisissante et troublante.
Qu’on soit de peu ou d’aucune religion, ou croyant d’une façon ou d’une autre, le lieu : une chapelle, ajoute à sa réflexion puissante sur le fait d’être incarné.
Avoir à être un corps est la relation intime la plus commune et la plus mystérieuse. Or, la tresse du commun et du mystère est éclatante dans les treize portraits monumentaux (375 x 55 cm) de l’artiste qui restituent l’étonnement face à la corporéité.
La peintre s’est représentée et a peint sept modèles non professionnels (cinq femmes et deux hommes) rencontrés par hasard. Chaque œuvre est divisée en cinq sections de taille égale qui brouillent la notion de genre. La technique, l’acrylique sur papier, offre des rendus fantastiques dans lesquels la peau tend à devenir vêtement.
L’aplomb des sujets est, au premier abord, dérangeant. Mais, en fait, non, c’est leur immense dignité qui intimide ! Une souveraineté bousculant moins notre pudeur que nos habitudes : celles du spectacle des corps banalisés dont les mises en scène oscillent entre l’exhibition marchande de la beauté et les conventions d’un érotisme ininspiré ou fatigué. Ici, on fugue hors des sentiers battus. Alors, il faut s’approcher, s’observer, s’apprivoiser… Prendre le temps. De tout son long. De bas en haut et vice versa. La familiarité naît, peu à peu, sans avoir raison de la part d’étrangeté du regardé qui nous regarde. La majesté de chacun s’accroît. L’expérience des Piliers sacrés est donc vraiment celle de la rencontre : des rencontres de la peintre avec elle-même et ses modèles, puis du spectateur avec des portraits témoignant d’une bienveillance pour l’intégralité du corps. Un corps anté-chrétien, simple et subtil. Très humain. Comme en grâce.
Je vous renvoie aux extraits du dialogue entre Maud Deschamps et le philosophe et poète Jacques Sojcher dont l’artiste a posté, sur internet, des vidéos.
Cher tout le monde, femmes, hommes et tant d’autres, planons encore un peu dans la grâce ahurissante avec All Farewells Are Sudden un morceau du groupe A Winged Victory For The Sullen.
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